Sous l'oeil d'un Dieu

J'allais leur prouver que j'avais raison, que ma théorie, c'était pas du vent. Ah oui, on rigolait bien de moi et de ce que j'avançais, mais dans toutes les séries que je regardais, je savais dans les dix premières minutes qui était le tueur, et pourquoi… Parce qu'ils avaient tous la même logique. Un Modus Operandi qui ne changeait jamais. Cette fameuse signature qui leur donnaient généralement leur nom (l'étrangleur de Boston, le cannibale de Milwaukee, l'infirmière de la mort,…)

Et je leur ai dit au bureau ! Moi, si j'étais un tueur en série, jamais je ne me ferais choper ! 

C'est ce qui les a fait le plus rire de la semaine ! Plus que quand Greg a mangé mon lunch mardi, et s'est proposé de me "le rendre" en mimant de mettre deux doigts dans sa gorge. Plus que quand quelqu'un a éteint les lumières des toilettes, sans les rallumer alors que j'ai dit qu'il y avait quelqu'un !

Des bonnes blagues entre collègues, disaient-ils. Enfin, bonnes blagues tant que ça les faisait rire eux.

J'ai essayé de faire des blagues aussi. Bon, ok, le coussin péteur fait moins rire de nos jours, mais j'ai lu sur Internet que de coller une photo de Nicolas Cage sous la souris, sur le capteur, était un must… Apparemment, ça n'a pas fait rire le gars du département IT qui a dû se déplacer pour décoller une image sous une souris. 

Moi je pense que j'aurais trouvé ça drôle.

Mais il y a 3 mois, ils discutaient du dernier épisode de la série sur le département des sciences du comportement de Quantico. Le département qui permettait à tout le monde de découvrir qui étaient les tueurs en séries qui agissaient de nos jours, je n'ai pas pu m'empêcher de rire. Ils y croyaient vraiment à ces conneries. 

C'est là que je leur ai dit que si je voulais, je pourrais être un tueur en série qui ne se ferait jamais arrêter.

Ils ont stoppé net leur discussion, m'ont regardé avec leur expression favorite "La vache qui regarde passer un train" puis se sont mis à rire. 

Pour faire bonne figure, j'ai ri avec eux, comme si j'avais fait une bonne blague, puis je suis retourné bosser. Mais je le sais, au fond de moi, que je peux devenir le plus grand tueur en série, et ne jamais me faire attraper…

 

Ça fait des années que le sujet m'intéresse. J'ai lu des livres sur Ted Bundy, Charles Manson, Francis Heaulme,… Des livres de fictions sur des tueurs en série. J'ai étudié ce qui faisait leur succès, et j'ai compris pourquoi ils s'étaient fait arrêter. J'ai vu toutes les saisons des Experts, Manhattan, Las Vegas, tout ça, donc je sais comment la police procède pour relever les preuves. J'ai regardé Esprits Criminels, avec leur département pour retrouver les pires tueurs. J'ai traîné sur Internet, où des moyens de tuer rapidement et facilement ne manquaient pas.

Je sais exactement ce qu'il faut faire, et surtout ce qu'il ne faut pas faire. Changer de mode opératoire, ne pas avoir un profil précis, et ne pas faire le malin avec la police. C'était la base.

J'avais déjà une idée générale de ce que j'allais faire, il me restait quelques détails à peaufiner. J'ai donc profité de mon week-end pour mettre mon plan au point. J'allais pouvoir leur prouver à tous que je n'étais pas insignifiant. J'allais pouvoir prendre ma revanche sur cette bande de lourdauds incompétents.

 

J'ai commencé par la facilité. Une prostituée. Un gros billet pour qu'elle m'emmène dans sa chambre miteuse… Je l'ai étranglée avec un foulard trouvé sur place. Je lui avais dit que j'aimais les jeux coquins et que j'adorerais lui passer un foulard autour du cou. Elle n'a pas réagi quand j'ai commencé à serrer, ça faisait partie du jeu. Elle a commencé à paniquer quand je n'ai pas relâché tout de suite… Et j'ai lu l'horreur dans son regard quand elle a compris que je n'allais pas du tout relâcher. J'ai plongé mon regard dans le sien. J'avais le pouvoir sur elle. J'étais Dieu, je décidais de sa vie et de sa mort. Elle a essayé de se débattre, mais comme elle était déjà en début d'asphyxie, elle ne savait pas faire grand-chose. J'ai bien pensé jouer avec elle un moment, lui laisser reprendre son souffle avant de resserrer le foulard, mais comme c'était la première fois, j'ai préféré ne pas prendre de risque. J'ai regardé la lumière s'éteindre dans son regard, ses bras retomber le long de ses flancs, la vie quitter son corps, et j'ai maintenu le foulard pendant 10 minutes après ça, pour être sûr, pour profiter du moment d'euphorie, me gorger de sa mort, apprécier le pouvoir que j'avais entre les mains. Un Foulard, une volonté, et j'étais un Dieu. Pas le Dieu miséricordieux de ces crétins de catho, non, un Dieu puissant, implacable, qui abattait sa force sur qui il voulait.

J'ai quitté la chambre tranquillement, me sentant léger et plein de vie, en emportant le foulard… Un souvenir… Et je suis rentré chez moi. J'ai pris une douche, pour m'enlever l'odeur de son parfum bon marché du corps, et je me suis mis au lit. J'ai passé une nuit incroyablement reposante. 

J'ai été serein pendant 3 jours. Les 3 meilleurs jours depuis l'épisode du chien errant, quand j'étais ado. Mais les blagues débiles ont recommencées au bureau. Il fallait que je relâche la pression à nouveau. Et je savais comment le faire. J'avais repéré un SDF qui dormait tout seul, dans le fond d'une petite ruelle… Pas d'arme improvisée pour lui, mais mon couteau de cuisine. Une découpe nette, de l'aorte à la carotide, en une fois, pendant que je lui tirais la tête en arrière. Il était tellement défoncé qu'il n'a pas compris ce qui lui arrivait avant de sentir le sang couler sur sa poitrine. Moi je comprenais, je vivais, je regardais la vie quitter son corps, ce vaisseau se vider de son essence, me remplissant, moi ! J'étais puissant, Dieu était de retour ! Il a essayé de retenir quelque peu de son sang, de plaquer ses mains sur son cou. Ce geste désespéré, pitoyable, m'a fait rire. Qu'est-ce qu'un moucheron comme lui pouvait faire contre un Dieu ? Rien, absolument rien. J'avais décidé de sa mort, elle était inéluctable. Ma volonté était supérieure ! 

Avant de partir, j'ai pris soin de découper un morceau de ce qui était son manteau, ce morceau de tissu dégoutant qui lui tenait chaud par nuit froide… Un souvenir… Il allait falloir que je me trouve une armoire pour ranger les souvenirs, parce que j'y prenais goût…

Depuis mon adolescence, c''était un rare moment de calme en moi. De sérénité même. J'avais toujours éprouvé ce mépris pour les autres, et cette aversion à devoir me soumettre à l'autorité. Je valais mieux que cette fameuse autorité. Les profs ? Quelle vaste blague. Ils connaissaient leur programme de cours, mais rien d'autre. Je leur était tellement supérieur, mais je ne pouvais rien dire, parce qu'une remarque dans mon carnet de correspondance me vaudrait encore une raclée en rentrant. Bien qu'il ne faille pas toujours de remarque de la part de mes chers professeurs. Parfois, un simple détail comme un papier qui trainait suffisait à déchainer les foudres du paternel. Cette injustice, plus que les coups eux-mêmes, faisait bouillonner ma colère. L'injustice d’être supérieurs à ces veaux, mais de devoir me soumettre, parce que c'est ce que la société exigeait. Et qu'il fallait que je m'intègre dans cette société idiote. Et cette hargne avait besoin d'éclater pour que je sois serein. Enfin.

J'ai tenu deux jours… Deux jours de souffrance au bureau, avec les sous-entendus de Greg… Même Bach ne parvenait plus à me calmer ce deuxième soir… Il fallait que je sorte, que je trouve, que je lui prouve à ce moins que moi que j'étais le meilleur !

Je suis sorti. Et ce soir-là, j'ai emporté Jean-Sébastien avec moi. Les Mouvements au violoncelle… Les sonorités graves de l'instrument, la vitesse d'exécution, j'ai été pris au jeu, je me suis senti pousser des ailes. J'avais envie de voir la vie avant d'apporter la mort. Et quoi de plus vivant que la jeunesse ? J'ai donc été me promener du côté du skate park. Rendez-vous des jeunes de la ville, des dealers, des skateurs, des indolents, des rebuts… Aucun d'entre eux ne manquerait vraiment à la société. Je faisais un travail social ! En plus de prouver aux lourdauds que j'avais raison ! 

J'ai attendu, dans l'ombre, avec Jean-Sébastien, qu'une brebis s'éloigne du troupeau. Je venais de finir le second mouvement lorsque j'ai aperçu celui qui ferait partie de mon œuvre. Il disait au revoir à ses amis, et repartait, seul, vers le métro. Troisième mouvement, Courante… Un signe du ciel… J'ai accéléré le pas pour le rejoindre juste sous le pont, et je l'ai poignardé, 4, 5 ou 10 fois, je ne sais plus trop, en le serrant dans mes bras, comme mon fils que je venais de retrouver. J'ai senti son souffle se faire rare, ses poumons troués ne retenant plus l'air inhalé. J'ai attrapé sa planche avant qu'elle ne tombe bruyamment sur le sol, et je l'ai accompagné gentiment s'allonger, alors qu'il me regardait, ses yeux si jeunes implorant une seconde chance, alors que la première s'enfuyait loin de lui… J'ai senti son dernier souffle sur mes lèvres, au moment où je le déposais sur le sol. Un long souffle, qui a vidé ce que ses poumons troués pouvaient encore contenir, après deux courtes inspirations, où j'ai bien compris qu'il voulait encore dire quelque chose… Mais les menuets de Jean-Sébastien sont tellement plus appropriés à un tel moment que je n'ai pas essayé de l'écouter. À quoi bon ? La planche de skate faisait un bon souvenir. De plus, cela dirigerait la police vers un vol avec violence. Tout était bon à prendre.

 

J'ai retiré mon imperméable et mes gants, et je suis calmement rentré chez moi. 

 

Il fallait que je change de ville. Cela faisait partie du plan. Des victimes sans lien, des modes opératoires différents, des villes différentes. Comment quelqu'un pourrait-il faire le lien entre une prostituée étranglée dans une ville, et une mère de famille écrasée dans une autre ? Personne. Tant que je n'étais pas pris en flagrant délit, je pouvais continuer, augmenter la liste des victimes et devenir le plus grand tueur en série de tous les temps…

 

Le lundi suivant, je suis donc parti… 150 km de voiture pour la grande ville proche. Je savais ce que je voulais faire. Il me restait juste à trouver la victime. Et finalement, c'est venu assez vite… En haut des marches en pierre de la gare, le long escalier pour arriver sur le quai, en pleine heure de pointe… Elle est arrivée en haut des marches avec sa valise, essoufflée, il lui restait deux marches pour stopper et reprendre son souffle… Pas de chance pour elle, mon pied placé juste en dessous du sien quand elle voulait monter, et une petite poussée à l'épaule ont suffi à lui faire perdre totalement l'équilibre. Et le geste du bras en avant pour faire croire que je voulais l'aider, tout en la repoussant un peu en arrière… Quel bonheur de voir la détresse dans son regard, et puis la compréhension de ce qu'il se passait, lorsque, tendant la main vers elle, elle a senti que je la poussais plus loin vers les marches en pierre de l'escalier… J'ai cependant sauvé sa valise. Alors que son corps s'en allait, bondissant et rebondissant sur les marches, prenant des positions de plus en plus ridicules pour un corps humain, craquant et croquant de tous côtés, sa valise était sauvée. Chaque sursaut de son corps sur les marches, chaque bruit de ses os se brisant, chaque cri des badauds me remplissait d'une énergie Divine ! Tremblez, pauvres mortels, Dieu est parmi vous ! J'ai emporté la valise. Personne ne m'a porté attention, l'homme qui s'éloignait d'un accident si horrible, avec sa valise, en costume cravate, sans doute attendu pour une réunion… 

Le premier s'étant passé si rapidement et si simplement, j'ai eu envie de profiter de mon passage dans cette ville pour effectuer le deuxième plan, prévu à la base pour la semaine suivante. Mais pourquoi freiner le plus grand tueur en série de tous les temps ?

 

Après avoir déposé mon bagage dans le coffre de ma voiture, je me suis dirigé vers la rue commerçante, bien remplie en ce jour de soleil. Il allait falloir être rapide, précis, et avec la bonne victime… Le plan était simple, mais la réalisation ardue. Il s'agissait de s'approcher de la victime, de la "bousculer" dans la foule, tout en enfonçant un couteau à filet, une longue lame acérée, dans son ventre, assez longue que pour déchirer l'aorte abdominale puis de s'éloigner nonchalamment, tandis que la victime s'effondrait, morte avant d'avoir touché le sol. Il fallait donc trouver la bonne victime, de la bonne taille pour pouvoir toucher l'aorte sans erreur. Quelqu'un de légèrement plus grand que moi, sans embonpoint, sans grosse veste, avec des vêtements sombres pour que le sang ne se voie pas tout de suite. J'avais découvert cette technique sur Internet. Sur un Forum parlant des bizarreries du corps humain. L'aorte abdominale est une aorte essentielle, et si elle est déchirée, la pression sanguine chute tellement vite que le cerveau est rapidement vidé de sang. Donc, perte de connaissance dans les quelques secondes, et mort inévitable dans les quelques minutes qui suivaient. Ce forum était une source d'inspiration. Sans qu'ils le sachent, ces inconnus m'avaient enseigné comment tuer facilement, rapidement. 

 

Ça m'a pris presque une heure. Une heure de "lèche vitrine" forcé, à regarder la foule dans le miroir des devantures des magasins, mais je l'ai vue. Grande, élancée, sur talons aiguilles, robe noire et gilet gris foncé… Idéale… Je l'ai dépassée d'une dizaine de mètres, puis je suis revenu vers elle, absorbé dans mes pensées ne regardant pas réellement devant moi. Il fallait que je la bouscule sur son côté gauche, que j'enfonce rapidement et précisément la lame, et que je la retire aussi vite. Un petit pas de danse mortel. Elle allait danser avec Dieu. En m'approchant, j'ai lentement fait glisser la lame le long de mon bras, et j'ai assuré ma prise sur le manche. Et puis, le choc. La lame qui s'enfonce, une exclamation de sa part, un grognement d'excuse de ma part, un demi-tour pour que j'aie le temps de retirer la lame tout en la regardant dans les yeux. 

Cela n'a duré que deux secondes, mais deux secondes éternelles. Deux secondes pendant lesquelles son regard a exprimé une étendue d'émotions incroyables. La colère au moment du choc, la souffrance quand la lame s'est enfoncée, la peur quand son cerveau a compris que Dieu venait de frapper. J'ai poursuivi mon demi-tour pour reprendre mon chemin, tout en essayant de réfréner le sourire de contentement qui voulait s'afficher sur mon visage. Je me suis rapidement éloigné de la scène, où j'entendais les passants essayer de réveiller cette dame qui venait de faire un malaise dans la rue. Je me suis mis le long du mur pour essuyer la lame avec un beau mouchoir, puisque cela serait le seul souvenir que j'emporterai d'elle, et j'ai eu envie de faire des achats. Une nouvelle paire de chaussures. Oui, je l'avais bien méritée ! 

 

Je suis rentré dans une boutique, et j'ai fait mon achat. Pendant ce temps, les ambulanciers repartaient avec une civière couverte d'un drap blanc. Il fallait que je me retienne d'exploser de joie… J'avais encore réussi. Dieu était présent ! Cette petite commerçante effrayée de voir passer la civière ne se rendait pas compte que Dieu était avec elle ! Et Dieu allait encore frapper ! Oh oui, il m'en fallait plus ! Je lui ai demandé une pointure qui ne se trouvait pas en rayon. Dès qu'elle est entrée dans la réserve, j'ai placé le panonceau "fermé" sur sa vitrine et j'ai tourné le verrou. 

Puis je l'ai suivie, sans bruit. Je suis arrivé derrière elle, j'ai plaqué ma main gauche sur sa bouche, et de la droite, je l'ai proprement éventrée. Une longue ouverture dans son ventre, de bas en haut. Je l'ai gardée serrée contre moi, sa tête contre ma poitrine. Je sentais la panique dans tout son corps, son petit corps qui se débattait contre mon corps de Dieu. Cette sensation de puissance qui m'envahissait à nouveau, cette euphorie. J'étais le Maitre de la vie et de la mort ! Je frappais où et quand je le voulais. Je régnais sur le royaume de leurs misérables existences !

Je l'ai gentiment posée par terre. Elle était amorphe, mais un soupçon de vie brillait encore dans son regard. Et je voulais voir ce soupçon s'évanouir. Je voulais qu'elle contemple le Dieu qui l'avait arrachée de son existence. Je voulais être la dernière image qui lui restait de son monde. Je me suis approché d'elle et j'ai plongé mon regard dans le sien. Cette sensation de toute-puissance ! Il fallait que je m'en imprègne. Que je m'imprègne de sa mort.

Quand son regard s'est troublé et que la vie a définitivement quitté son corps, j'ai pris une de ses chaussures. Je l'ai empochée, et je suis reparti. 

J'ai laissé le panneau sur "Fermé" sur sa porte, pour me laisser le temps de rentrer. 

J'étais sur un nuage. Trois… Trois en une journée… J'étais gonflé à bloc. Même les blagues idiotes et dégradantes de Greg ne pourraient pas m'atteindre.

 

J'en étais déjà à six ! Et aucune chance de me faire attraper ! Pas d'empreinte, pas de traces… Je suis génial ! Le plus grand ! Jamais ils ne feraient le lien entre les victimes, parce que je suis ce lien et qu'ils ne me trouveront pas ! 

 

J'ai repris ma voiture, avec, dans le coffre, la valise, le mouchoir et la chaussure. Et je suis rentré chez moi. Et j'ai dormi… Le meilleur sommeil de ma vie… Profond, reposant, d'une traite. Au matin, j'étais reposé comme si j'avais dormi 10 jours d'affilées… Je suis parti au bureau, prêt à affronter l'humour de bas étage de Greg. 

La journée s'est passé comme dans un rêve. Il a bien essayé de se moquer de moi, mais rien ne m'atteignait, et il a donc abandonné rapidement la partie. On ne joue pas contre un Dieu ! Mais il a essayé… Il a essayé de souiller un Dieu, il fallait qu'il reçoive la monnaie de sa pièce. Il fallait qu'il découvre le Dieu qu'il tentait de mettre en boite depuis si longtemps !

 

Je devais être prudent pour celui-là. Réussir à faire passer cela pour un accident, pour ne pas être interrogé par la flicaille. Pour ne pas établir de lien.

J'étais assez gorgé de mort pour tenir une semaine. Une semaine pour élaborer le plan génial pour me débarrasser de ce moucheron irritant qui se pensait drôle.

J'aurais voulu le démembrer, le dépecer, lui arracher les doigts un par un, le faire bruler, le voir souffrir ! Mais je ne pouvais pas. Il fallait que je sois loin de lui lorsque cela arriverait.

Une intoxication au monoxyde de carbone ? Pourquoi pas… Mais pour cela, il fallait que je puisse m'introduire chez lui.

Un accident de la route ? Je n'étais pas sûr qu'il meure sur le coup… 

J'ai donc poursuivi mes recherches… Et j'ai trouvé. Il me piquait régulièrement ma bouffe dans le frigo, donc je n'avais qu'à empoisonner ma nourriture… Personne ne me soupçonnerait d'avoir volontairement empoisonné MA nourriture, sans savoir s'il allait voler ce que j'avais apporté ce jour-là ! Brillante idée… Je n'avais qu'à empoisonner mes plats tous les jours, jusqu'à ce qu'il se décide à m'en voler un, et à se régaler à mort… 

Il ne me restait qu'à trouver le poison idéal. Parce que l'idée d'empoisonner un plat est simple, mais trouver le poison… On n'est pas au moyen-âge, où tout le monde semblait se promener avec une fiole de poison autour du cou, ou de la poudre suspecte dans sa chevalière…

Et puis, une révélation… Le muguet… La plante qu'on offre pour "le bonheur", qui est tellement toxique que même l'eau dans laquelle on la met devient toxique ! J'ai donc été chercher des brins de muguet, et je les ai mis dans l'eau. 

Deux jours plus tard, je les ai retirés de l'eau et je les ai mixés en une purée. Et j'ai cuisiné. J'ai fait une sauce à l'oseille et muguet, détendue à l'eau de muguet, pour accompagner du saumon et du riz, cuit à l'eau de muguet. J'ai préparé plusieurs portions, emballées dans des contenants différents, avec une belle étiquette à mon nom. Un appât de choix.

 

Le lendemain matin, au bureau, j'ai placé une de ces boites dans le frigo au bureau. Et j'ai commencé ma journée de travail. J'ai à peine entendu Greg ce matin-là. Je pense qu'il a essayé de me parler pour me faire sortir de mes gonds, mais j'étais dans un tel état d'excitation et d'euphorie en pensant à ce qui allait se passer que ses brimades me sont littéralement passées au-dessus de la tête. Et c'est certainement ce qui a causé sa perte ! Frustré de ne pas avoir réussi à m'emmerder verbalement, il a décidé de m'emmerder autrement. Et il m'a donc piqué mon petit plat, préparé avec amour… 

J'ai feint de ne pas le voir manger mon repas, absorbé dans mon boulot, sautant la pause de midi pendant qu'il se goinfrait… Une heure plus tard, il "dormait" sur son bureau… Il dormait tellement profondément qu'il s'est écroulé quand le patron l'a bousculé pour le réveiller… Crise cardiaque… Quel soulagement de le voir étendu là, les yeux vitreux la bouche ouverte, la langue pendante… En m'approchant de lui, comme tous les autres, j'en ai profité pour lui piquer son stylo fétiche. Et j'ai joué l'horreur. Oh mon dieu, Greg ! C'est si triste ! Il était si jeune ! J'ai pris une photo mentale de sa carcasse, jouissant intérieurement de sa déchéance. Aujourd'hui, c'est lui qui avait sa tête à hauteur de mes chaussures. J'ai dû me retenir de ne pas lui mettre un grand coup de pied dans sa bête face. Je voulais lui administrer une dernière humiliation, mais je ne pouvais pas le faire. Pas ici, pas maintenant. Cela se passera dans ma tête… Dieu avait encore frappé…

Le nombre de mes victimes augmentait graduellement… Je m'approchais de mon but. J'étais un serial killer qui ne se ferait jamais attraper. 

Mais je n'étais pas reconnu. Je ne me ferais jamais attraper parce que personne ne savait qu'un serial killer rôdait. Cela commençait à me frustrer. Il fallait que les mères préviennent leurs enfants avant de partir pour l'école. Il fallait que les journaux télévisés en fassent des caisses autour du mythe. Il fallait que les pères préparent leurs armes sous l'oreiller…

 

Cette dernière pensée m'avait d'ailleurs donné une idée. Rentrer dans une maison en pleine nuit et me défaire des habitants. Enfin, de l'habitante. Il fallait que je trouve la maison d'une célibataire. Cela serait plus facile à gérer. Un cambriolage qui tourne mal… Après ça, il faudrait que je trouve un moyen de me faire connaitre. Enfin, pas moi, mais de montrer au monde que Dieu était parmi eux, et que Dieu pouvait frapper n'importe où, n'importe qui…

 

Grâce à la mort de Greg, j'avais eu une semaine de congé. Le temps de se remettre de la mort de notre collègue bien aimé, mort si jeune d'une crise cardiaque foudroyante, comme l'a attesté le médecin qui l'a examiné… J'ai donc profité de cette semaine pour choisir le quartier tranquille dans lequel j'allais agir, et surtout, la maison où j'allais frapper… Le quartier a été aisé à dénicher. La maison, en revanche, m'a pris plus de temps. Il fallait que je puisse regarder ce qu'il se passait tout en passant inaperçu. J'ai donc été acheter des bâtons de marches et tout l'attirail du randonneur du dimanche, et je me suis promené dans ce quartier, étudiant les voitures avant tout. 

Exit les maisons avec des grosses voitures familiales pleines de stickers "Dylan à bord" ou les représentations de la famille en bonhomme bâton. Il fallait trouver une voiture susceptible d'appartenir à une femme seule. Une petite citadine, pleine de couleurs, avec un truc bien girly qui pendait au rétroviseur…

J'en ai repéré trois dans le quartier. Il fallait que je puisse me renseigner sur qui vivait dans ces trois maisons. L'attirail du randonneur pouvait passer encore une fois, mais il fallait que je revienne en soirée, discrètement, pour vérifier qu'une deuxième voiture n'était pas garée à côté. Peut-être même réussir à espionner l'intérieur de la maison.

Habits sombres, mais pas tout en noir, je suis reparti dans la soirée. Un peu plus courbé sur moi-même pour altérer ma silhouette, je suis reparti dans le quartier. Sans faire de grands tours, je me suis dirigé directement vers la première des maisons. La voiture n'était plus là. Mauvais signe. Soit elle avait un rencard, donc risquait de ne pas être seule quand j'entrerais, soit elle travaillait de nuit, donc ne serait simplement pas là de nuit. Il y avait sans doute d'autres possibilités, mais ces deux explications posaient déjà trop de problèmes que pour envisager cette maison-là. Il m'en restait deux.

 

J'ai choisi la voiture la plus pourrie des deux. Une vieille citadine d'il y a dix ans, à laquelle il manquait un enjoliveur. J'ai trouvé un buisson tout près, et j'ai attendu. Juste pour être sûr que personne ne venait se garer à côté et que la nuit tombe. Quand il a fait assez noir pour être invisible aux yeux des mémés radar à leur fenêtre, j'ai émergé du buisson et fait le tour de la maison. La plupart des pièces étaient éteintes, à part le salon. Où les tentures étaient encore ouvertes, et où j'ai découvert le Graal. Elle était seule, dans son salon, sous un plaid, avec un verre de vin, devant la télé. Si cela ne crie pas célibataire ? Il ne me restait plus qu'à trouver un moyen d'entrer.

Les autres pièces étant dans le noir, cela me permettait de faire tranquillement l'état des lieux. Regarder toutes les fenêtres, la porte arrière, les fenêtres à l'étage… Tout ce que je pouvais voir, et qui me donnait un point d'accès à sa maison. Et c'est à l'étage que je l'ai trouvé. Certainement la salle de bain, une petite fenêtre rectangulaire, ouverte en grand. Juste assez grande pour laisser passer quelqu'un, mais à l'étage, donc difficile d'accès. Il faudrait que je revienne avec une échelle. Et un casque de chantier et une veste fluo. Parce que quelqu'un qui se promène avec un casque de chantier et une veste fluo, et une échelle sous le bras, c'est quelqu'un qui a un travail à effectuer.

Je suis reparti chez moi, des idées plein la tête sur ce que je pourrais faire le lendemain, dans cette maison, avec cette célibataire…

 

Le lendemain, je suis donc allé faire mes achats. Dans deux magasins de bricolage, assez éloignés l'un de l'autre, j'ai acheté du tape résistant, une échelle, des tubes en PVC et j'ai demandé des conseils pour réparer une gouttière qui fuit.

Dans le deuxième, j'ai acheté un casque de chantier, des lunettes de protection, un marteau et plusieurs types de burins. Un achat groupé qui n'éveillait aucun soupçon. Et qui me donnait de nouvelles idées pour ce soir.

 

Le matériel dans la voiture, je suis retourné à la maison de ma future victime. J'ai sorti la veste fluo de ma boite à gant, et puis le casque et l'échelle pliable de mon coffre. Et j'ai naturellement pris le chemin de sa maison. J'avais un job à effectuer, et je n'avais pas peur de l'afficher. 

Derrière la maison, j'ai déplié l'échelle, et je l'ai cachée au fond du jardin. Et puis j'ai attendu. Il fallait que je "travaille" quelque peu avant de repartir. Pendant l'attente, j'ai réfléchi. J'allais commettre un nouveau meurtre dans ma série, mais jusque maintenant, personne à part moi ne savait qu'il y avait une série. Il fallait que je me fasse connaitre. Que je trouve un moyen d'envoyer des preuves à la police, pour qu'on parle enfin de moi. J'avais les souvenirs, il ne me restait plus qu'à trouver un moyen de les transmettre, sans trop de risque pour mon anonymat.

 

Après un laps de temps que je jugeais assez long, je suis reparti comme je suis venu, sans mon échelle évidemment, et je suis remonté en voiture, direction chez moi. 

J'ai laissé le matériel de bricolage dans la voiture, et j'y ai ajouté un grand couteau, des colliers de serrage et des gants en latex. J'ai fourré le tout dans un sac à dos noir et j'ai attendu la nuit. La seule inconnue de mon plan était de savoir si la fenêtre repérée hier était ouverte tous les jours. Si ce n'était pas le cas, il allait falloir que je revienne régulièrement, que je repousse mon grand moment avec elle, et je n'avais vraiment pas envie de ça.

 

Apparemment, mon pouvoir de Dieu s'étendait jusqu'à ma volonté, puisque la fenêtre était ouverte. Je suis donc allé rechercher l'échelle, en faisant le moins de bruit de possible et je l'ai installée sous sa fenêtre. J'avais pris des baskets avec une semelle bien souple pour ne pas faire de bruit. Et je suis monté, barreau après barreau, calmement, sans bruit, en épiant le moindre bruit provenant du voisinage ou de la maison. Je suis rentré dans la maison. J'avais raison, cette petite fenêtre donnait bien dans la toilette. Heureusement pour moi, parce qu'il y avait très peu de chance que cette porte soit fermée à clé. J'ai tenté l'ouverture, et bingo. 

Il fallait que je me décide rapidement sur la manière de procéder. L'attendre dans sa chambre, ou descendre et la surprendre devant la télé. 

J'ai choisi la première option. Il y avait un risque d'être découvert si je descendais. Un trop long trajet dans une maison que je ne connaissais pas, les tentures encore certainement ouvertes dans le salon, le risque qu'elle aperçoive mon reflet dans la télévision. Bref, l'attendre dans sa chambre m'offrait les meilleures options. Elle serait prise vraiment au dépourvu, sans défense. J'ai donc trouvé l'endroit parfait pour l'attendre, et je me suis installé, mon sac à dos à côté de moi, le rouleau d'adhésif sorti, prêt à l'emploi, gants de latex sur les mains, et j'ai attendu. Vers dix heures et demie, j'ai entendu du bruit. Elle n'allait sans doute pas tarder à monter se coucher. Sans doute après avoir bu un verre d'eau, puis un passage dans la salle de bain, les toilettes, et enfin, la chambre… 

Quelques minutes d'attente… Et la porte s'est ouverte. Avant qu'elle n'ait eu le temps d'allumer, j'ai attrapé son bras, je l'ai attirée vers moi et lui ai plaqué une main sur la bouche. Je l'ai attiré vers le sol, pesant de tout mon poids sur son petit corps, gardant une main sur sa bouche, et j'ai attrapé l'adhésif. Une grande bande collée rapidement sur sa bouche m'a permis d'utiliser mes deux mains pour la contenir avec les colliers de serrage. Un pour les mains, un pour les pieds. Elle était toute à moi… Immobilisée, effrayée, impuissante face à Dieu… Je voulais profiter de ce moment le plus longtemps possible. J'ai remis plusieurs morceaux d'adhésif sur sa bouche, pour m'assurer qu'elle ne puisse jamais crier, et j'ai fait un premier test. Une longue estafilade sur son bras… 

Elle a essayé de crier, mais le son était tellement étouffé par l'adhésif que personne en dehors de cette pièce ne pouvait l'entendre.

Je l'ai portée dans son lit, et je me suis positionné au-dessus d'elle, pour pouvoir la regarder de face. Je pouvais enfin expliquer à quelqu'un ce que je faisais. J'en ai profité. Je lui ai expliqué avec tous les détails ce que j'avais fait avant elle, et pourquoi je le faisais. Je lui ai raconté le plaisir que j'ai éprouvé quand j'ai serré le foulard autour du cou de cette pute qui ressemblait étrangement à ma mère. Je lui ai expliqué le bonheur de trancher la gorge de ce clodo comme j'avais tant voulu égorger le paternel. Je lui ai dit qu'elle faisait partie d'une œuvre plus grande qu'elle, qu'elle était partie prenante de mon chef d'œuvre. Elle a écarquillé les yeux, comprenant que pour elle, c'était la fin, alors que pour moi, c'était le début. Et j'ai coupé. Sur l'autre bras, une autre entaille. Je ne suis pas médecin, j'ai une compréhension basique de l'anatomie (sauf quand il s'agit de savoir ou planter une lame pour tuer rapidement), mais à moins de trancher les veines du poignet, je pouvais entailler les bras sans risquer de la tuer trop vite. 

J'ai eu envie de tester le marteau et les burins. Après tout, je les avais achetés, autant qu'ils servent. Je me demandais ce qu'il se passerait si je mettais un gros coup de marteau sur un burin posé sur son tibia… 

J'ai lu quelque part que l'os humain était une des matières les plus résistantes. Est-ce que son tibia résisterait à un coup de burin ? À deux ? 

J'ai donc été chercher le matériel. Quand elle m'a vu sortir les instruments, j'ai entendu ses cris étouffés. Cela m'a fait sourire. Elle avait compris que je n'étais pas prêt à partir. Qu'elle allait faire partie de mon œuvre pendant une partie de la nuit.

 

Il s'avère qu'un bon coup de marteau, un seul, avec un burin plat placé directement sur le tibia, suffit à briser net l'os. Sa jambe faisait un angle bizarre, pliée plus bas que le genou, dans l'autre sens… Ça n'était pas plaisant à regarder, et, à entendre ses gémissements, ça n'était pas plaisant à recevoir. J'ai jeté la couverture pour cacher cette jambe. C'est là que je me suis rendu compte que je ne voulais pas infliger de souffrance. Je voulais voir l'horreur dans leurs yeux quand ils voyaient le Dieu qui était en face d'eux. Donc j'ai repris le couteau. Une arme simple, belle, qui inflige la douleur et la mort… Je me suis remis au-dessus d'elle et j'ai plongé mon regard dans le sien, approchant mon couteau de sa gorge. Et j'ai retrouvé le regard que j'attendais, ce regard de peur panique.

Pour la remercier, j'ai planté le couteau dans sa gorge, juste au-dessus des clavicules, et je l'ai regardée. Elle a mis longtemps à mourir… S'étouffant à moitié dans son sang, ne parvenant plus à s'oxygéner. Et ce regard de pure panique, ses yeux qui s'agrandissaient de seconde en seconde. Plus elle approchait de la mort, plus j'aimais son regard. Jusqu'au dernier moment, j'ai maintenu le contact visuel. Je me suis gorgé jusqu'à la dernière seconde de ce pouvoir que j'avais sur elle… C'était vraiment divin… Lorsque ses yeux sont restés fixés sur le plafond et que sa poitrine a arrêté de chercher à se remplir, j'ai sorti le couteau de sa gorge et je l'ai essuyé sur ses draps. J'ai arraché l'adhésif et coupé les colliers de serrage pour ne pas laisser intentionnellement de preuves matérielles de mon passage, et j'ai remis le tout dans mon sac à dos.

J'avais le choix de prendre n'importe quel souvenir, mais sur le sol de la toilette, sa petite culotte gisait. Je l'ai empochée, et je suis reparti comme je suis venu. J'ai remis l'échelle où elle était, cachée dans le fond du jardin, et je suis rentré chez moi…

 

Il fallait que je m'occupe maintenant de la partie la plus risquée. Me faire connaitre. J'ai tapé une lettre expliquant les meurtres commis, quels souvenirs j'avais emportés et je l'ai imprimée. J'ai ouvert la valise et j'ai mis les souvenirs des autres victimes dedans. Il fallait que je fasse livrer le tout au poste de police. Trouver une caisse assez grande, et déposer cela dans une poste, assez éloignée, assez petite pour qu'il n'y ait pas de caméra, mais assez grande pour qu'on ne se souvienne pas du gars qui a posté un colis énorme à la police…

Non… Un livreur UPS. C'était le moyen le plus simple. Mais pour cela, il fallait un compte, une adresse d'où retirer le colis, procéder au paiement en ligne… C'était frustrant ! Tout était parfait jusque-là ! 

Non, il n'y avait qu'un moyen, c'était d'apporter moi-même le colis. Un polo brun, un pantalon noir, une casquette, je dépose le colis et fais semblant de prendre note sur mon smartphone, et je suis sorti. Un livreur pressé qui n'a pas envie de perdre son temps parce qu'il sait qu'il est à la bonne adresse. C'était le plus sûr. En plus, avec la casquette, j'évitais une bonne partie de reconnaissance par caméras.

 

Le plus dur, dans ce plan, ça a été de trouver la caisse en carton. Bon, pas si compliqué que cela au final, cela m'a pris une demi-heure de recherche dans les rebuts de supermarchés.

 

Caisse refaite, valise emballée, lettre collée, je me suis changé, et j'ai mis le tout dans ma voiture, direction le commissariat. Je me suis garé, j'ai sorti la caisse, et je me suis dirigé plein de confiance vers l'accueil. J'ai déposé la caisse en annonçant qu'on colis était là pour les enquêteurs, j'ai fait semblant de noter la livraison sur mon smartphone et je suis ressorti comme je suis rentré, plein de confiance. 

Il ne me restait qu'une étape que je ne pouvais pas rater si je voulais devenir le plus grand tueur en série de tous les temps.

 

Je suis rentré chez moi, j'ai changé de vêtements et j'ai jeté ceux que j'avais porté dans le vide ordure. L'étape la plus dure venait.

Il fallait que j'arrive à coller le poignard de glace que j'avais mis si longtemps à fabriquer sur un mur, et que je me jette dessus… 

Dans la lettre à la police, j'ai décrit tous les meurtres, même le mien, à l'arme blanche, chez moi. J'ai donné mon adresse pour qu'ils trouvent mon corps. Mais il fallait que j'aille au bout.

 

J'avais préparé un "couteau" en glace. Un pic de glace, coupé, gelé, recoupé, regelé, pour avoir une arme fatale, mais qui allait fondre. Pas d'arme sur le lieu du crime si elle a fondu, donc, pas de suicide, donc le tueur court encore !!! C'était toute l'ingéniosité du plan ! J'avais tué de tellement de manières différentes, tellement de profils différents, que même après ma mort, les flics étaient capables de me mettre sur le dos un crime insoluble.

J'ai scotché mon poignard de glace sur le mur, et sans regret, je me suis jeté dessus. La Froideur m'a transpercé, mais j'étais un Dieu. Je mourrais dans la réalité, mais je restais vivant dans la légende, et j'allais continuer à tuer… 

Encore, et encore, et encore… 

 

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